Pourquoi j’ai écrit ce livre
Si le premier livre que j’ai écrit sur Pascal était issu d’une thèse, j’aspirais de plus en plus à lui consacrer un livre littéraire. À l’occasion d’un voyage à Paris, je découvris par hasard plusieurs livres de la collection le Paris des Écrivains. Pourquoi ne pas écrire un Paris de Pascal ? Cependant, malgré des recherches avancées, ce projet ne put aboutir.
Professeur émérite à Sorbonne Université, Gérard Ferreyrolles, à qui j’avais fait part de ce projet, me suggéra alors d’« écrire une biographie complète de Pascal » qui faisait défaut. Écrire une biographie complète de Pascal, associant vie et écrits, et l’écrire non pas dans un style universitaire mais de manière littéraire. Tout en s’appuyant sur les connaissances les plus sûres, il fallait donner à lire, imaginant la vie intérieure de Pascal, peignant lieux, temps ou scènes, l’histoire bouleversante d’une vie.
Il fallait marcher sur les pas de Pascal.
Extrait
Par attention aux pauvres, Pascal avait demandé à aller habiter chez sa sœur Gilberte. On l’imagine, après avoir préparé son départ, regarder une dernière fois les choses qui l’entouraient, se souvenir des grands événements de sa vie, contempler par la fenêtre le ciel, écho silencieux de l’infini. Ses doigts traçant au charbon sur le sol des figures, son esprit retrouvant la proposition d’Euclide, la conversion de Rouen, la verrerie, les expériences sur le vide, le puy de Dôme, la tour Saint-Jacques, la mort de son père, l’entrée en religion de Jacqueline, les recherches sur le jeu, le château de Bien-Assis, l’asile de Port-Royal des Champs, la chapelle de Port-Royal de Paris, la guérison miraculeuse de Marguerite, la bataille des Provinciales, la signature du formulaire, le concours de la roulette… Il revoit sa machine à calculer, les carrosses à cinq sols passant dans sa rue et les visages de savants de l’Académie Mersenne, des amis de Port-Royal, du duc de Roannez, de Domat, les visages des pauvres. Autour de lui, des traités scientifiques inachevés, les liasses de son Apologie inachevée, quelques rares livres dont la Bible. Dans le pourpoint de son habit, il sent la présence du parchemin gardant mémoire de la nuit de feu. Dans l’âtre, le feu va s’éteindre. Le bruit des roues d’un carrosse résonne sur le pavé. Au loin, on entend les cloches d’une église. Il faut partir.
Site : bernardgrasset.fr