Bernard Grasset, Fontaine de clairvent (quatrains des saisons)

Vieille-Église-en-Yvelines, éditions Au Salvart

Pourquoi j’ai écrit ce livre

L’écriture des soixante-quatorze quatrains qui composent Fontaine de clairvent est en grande partie contemporaine de celle de ma biographie, Sur les pas de Pascal, et en constituent comme le contrepoint poétique. Le quatrain s’inscrit dans une écriture de la brièveté, cultive une sobriété de langage au service du seul essentiel. Ceci n’est exclusif ni de lyrisme, ni d’émotion, mais de manière voilée, sans bavardage rhétorique et en refusant tous les artifices. Écrire des quatrains revient à faire le choix d’une certaine forme de pauvreté en poésie, mais d’une pauvreté qui peut se faire hospitalière à l’éclair pur du mystère.

Des quatrains en harmonie avec la nature et les hommes qui l’habitent, à l’écoute des saisons, des paysages. Inscrire, au-dessous de chacun d’eux, la date ainsi que le lieu de son écriture, revient à souligner que les mots, tels ceux d’un journal, sont inséparables du temps et de l’espace de leur naissance. Comme un peintre plante son chevalet devant un paysage, le poète pose son écritoire devant les lieux où il voyage. Les mots s’allient à la vie.

Fontaine de clairvent, quatrains unis par l’invisible fil d’une quête de lumière qui, par-delà les vicissitudes des jours, se laisse aimanter vers les splendeurs oubliées et prête l’oreille aux mélodies murmurant au secret de nos existences.

Fontaine de clairvent

extraits

Falaise de craie,

Chapelet de sapins,

Rien ne rompt le silence

Que ce chant bleu d’oiseau.

(Lundi 5 juillet 2021 ‐ Grande Chartreuse)

Long, si long le chemin,

Voile de brumes sans fin,

De la Limagne aux cimes

L’instant bleu à cueillir.

(Lundi 16 août-dimanche 5 septembre 2021 ‐ Puy de Dôme)

Un banc gris face à la vallée

Où songer à l’éternité

À l’abri des bruits du monde

Comme éclair ou pas solitaire.

(Mercredi 29 septembre 2021 ‐ Magny-les-Hameaux, Port-Royal des Champs)

Les vagues de siècle en siècle

Heurtent sans fin la falaise,

Une croix, sacre des saisons,

Tu dis, tais l’énigme du vent.

(Vendredi 24 décembre 2021 ‐ Saint-Gildas-de-Rhuys)

Il est un pays, ailleurs,

Derrière la nuit du regard,

Un pays d’eau et de feu

Où revient l’écho des voix.

(Samedi 22 janvier 2022 ‐ Schubert, La jeune fille et la mort, La Roche-sur-Yon)

Chênes verts et oliviers,

Comme une averse de lumière,

La mort, la vie, revenir,

Secret sacré d’un rêve caché.

(Lundi 8 août 2022 ‐ Serrabona)

Et j’attends encore, source

De silence et d’espérance,

Vignes et palmiers, mains

Des saisons, pure transparence.

(Lundi 12 décembre 2022 ‐ Île de Lérins)