Vivant grâce à l’hospitalité

Dans l’Aveyron, la journaliste Cécile Allegra a créé un atelier pour permettre à des migrants d’évoquer en chanson les souffrances endurées pendant leur périple. Elle a tiré de ces sessions thérapeutiques un documentaire bouleversant au cours duquel accompagné de psys, d’un musicien, chaque migrant de l’atelier écrit puis chante le récit de ses souffrances. (« Le Chant des vivants », documentaire à voir sur France 3).

Après avoir visionné et écouté ce documentaire qui nous partage une expérience d’hospitalité reçue et donnée, j’ai écrit ces lignes :

Ils ont traversé le désert, enduré les camps libyens, survécu à la Méditerranée, et les voici scandant leurs douleurs :

« Je suis mort ; je suis vivant … mort, sous les tortures infligées ; vivant, car tiré des eaux prêtes à m’engloutir ... Qu’ai-je fait pour avoir à subir ces souffrances innommables : être violé avec les autres, eux aussi torturés ; voir de mes yeux ces corps d’hommes, de femmes, d’enfants entassés morts dans des containers ; connaître la faim, la soif, la solitude, l’abandon, les mains d’humains levés contre des humains ; voir mon frère avalé par la mer, lui qui, dans le Sahara, m’avait sauvé de la faim ? Je ne suis que douleurs ! »

Mais voici : après avoir chanté et dansé leur malheur, grâce à l’hospitalité reçue en Aveyron, ils ont inventé « le chant des vivants » aussi beau qu’un vitrail de Soulages inondé de soleil dans l’abbatiale de Conques ! Rencontre inoubliable.

Agnès Gueuret