Vertiges, ou les échos d’un chant
Marie,
« Heureux les cœurs purs », a annoncé ton fils, mais au travers de ton Magnificat, tu es déjà « heureuse » :
« Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit se réjouit en Dieu mon Sauveur. »
« Heureux les pauvres en esprit », a promis ton fils, mais toi, tu as déjà admis de ne pas comprendre le mystère du destin de l’enfant que tu portes.
« Heureux les affligés », a dévoilé ton fils, mais toi, exclue de la communauté des hommes pour accoucher…
« Heureux les doux », a déclaré ton fils ! La douceur, c’est choisir de chanter…
« Heureux les miséricordieux », a affirmé ton fils, mais toi, tu étais déjà sûre de « la miséricorde du Ciel qui va s’étendre d’âge en âge. »
« Heureux ceux qui ont faim et soif de justice », a proclamé ton fils, mais toi, tu as déjà compris que « les puissants seront renversés de leur trône et que les humbles seront élevés. »
« Heureux ceux qui procurent la paix », nous a révélé ton fils, mais toi, tu as déjà loué
« le secours à Israël et à la postérité d’Abraham »... pour toujours.
« Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice »... Ton exil forcé en Égypte n’est-il pas le signe de cette injustice flagrante ?
C’est par ce chant que ton fils a entendu dans ton sein que s’est tissée en lui cette certitude des béatitudes à venir, pour porter ta parole au monde entier.
Toutes les mères préparent la toile mais laissent signer l’enfant !
Ainsi, le retrait des mères est-il le don suprême de l’enfantement.
— Isaline Dutru