Au sujet de l’Inconsolation de Claude Plettner- Bayard – 2021
Il faut à Claude Plettener une immense humilité pour oser s’exposer avec une telle franchise et une ambition tout aussi démesurée pour se confronter avec le problème essentiel du mal et de la souffrance dans ce court texte ; une impudeur touchante pour évoquer ses « heures de marée basse » (p12), les « mauvaises saisons » de son choix de vie ( p19), « l’entaille du malheur » due au décès d’un proche durant la Covid (p23), « le deuil impossible » (p44), la malédiction de la cancre (p52), « l’impossibilité d’habiter « chez moi » ressentie comme la réplique de l’acédie propre aux moines (p59) et une rare délicatesse pour évoquer ces événements, ces sentiments, cette infinie tristesse d’une périphrase qui lui permet de « relancer les dés autrement » ; un sacré culot pour convoquer Ricoeur, Proust et Barthes, Picasso et « La femme qui pleure », Simone Veil, Camus et Antigone ; une maturité apaisée pour résumer en cinq pages la révolte de Job et son « écœurement des paroles pieuses ».
Comment ne pas être touché par ce texte éthéré, si personnel, éclairé par les rencontres de Marie la Magdaléenne et de Marie de Béthanie. Claude Plettner ne craint pas d’affronter la déshumanisation nazie, les « Folles de la place de mai », les victimes récentes d’une actualité dramatique (printemps arabes, Biélorussie). Elle nous livre au fil de l’écriture une affirmation et une question : « La force du christianisme est celle d’un amour divin rejoignant l’humain jusque dans ses abîmes sans s’épargner le scandale de la mort (p65), « Quelle foi serait crédible sans le risque de la traversée des impossibles et des illusions ? Et quelle espérance mériterait ce nom si elle ne promettait que le possible ? (p57).
Quittant le dénouement, je m’interroge. Claude Plettner nous livre cette phrase « si nous demeurons inconsolés… c’est parce que nous aimons la vie ». Je ne peux m’empêcher de la lire à l’envers « parce que nous aimons la vie, nous demeurons inconsolés ». Chère Claude, inconsolée, puissions-nous être auprès de toi comme tu t’es tenue page 38 auprès de cet ami venu frapper un soir à ta porte, effondré en sanglots.
Patrice Obert
Warning: Undefined array key "preview" in /home/ecrituretw/www2/wp-content/plugins/oxygen/component-framework/components/classes/comment-form.class.php on line 79