Nathalie Bauer : Qui tu aimes jamais ne perdras. Philippe Rey. 2023
L'amour est plus fort que la mort, l'amour ne s'achève pas après la mort… Ces paroles qui viennent nous consoler de la perte de l'être cher sont ici déployées dans une splendeur mystérieuse, un territoire "entre", fait de nuées blanches, de rêves, de voix, de bêtes telles des licornes à la lisière de forêts, attendant paisibles que nous les montions pour aller glisser entre les allées et pénétrer sans peur jusque-là où l'amour poursuit son travail de vie.
Un prologue, de sa furieuse beauté, nous guide dans les chapitres qui suivent pour nous projeter dans des univers de temps et d'espace différenciés avant qu'un épilogue, par sa douce libération, délivre en nous le secret. Entre les deux, des récits qui pourraient relever du plus quotidien de nos vies. Toujours deux personnages, amoureux, jumeaux, père et fils, disciple et maître, une nonne et un prédicateur… qui se jurent de toujours s'aimer sans même savoir qu'il se sont -peut-être- aimés. La foi ne se découvre pas toujours à celui qu'elle habite.
Pour chacun de ces récits, écrits tous au présent comme pour assurer ces vies de leur réalité vivante, aujourd'hui (l'amour en train de poursuivre son travail de vie), Nathalie Bauer use d'une langue propre au lieu et au temps où ils se déroulent. Ecriture somptueuse. Exercice d'écriture d'une maîtrise parfaite, le roman contient sa vibration propre, car c'est une unique et puissante vie qui sans cesse nous métamorphose en "formes" différenciées s'inspirant de l'infinie richesse de la Création, cette même vie "nous appelant et nous reperdant, pour nous retrouver une nouvelle fois, attirés les uns par les autres en vertu de ces antiques, universelles et mystérieuses lois qui dictent l'harmonie de l'ensemble et établissent que l'amour perdure au-delà de la mort et que la mort n'existe pas, du moins pas celle de l'âme".
Ce en quoi, le livre démontre ainsi la force des mots, la puissance de la fiction qui peut ainsi ramener à la vie les bien-aimés car en réalité, "nous ne faisons que produire du rêve". Et le rêve, c'est le vivant d'un désir de toujours continuer à aimer.