Catherine Chalier.  La gravité de l’amour

8 janvier 2017

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Catherine Chalier.  La gravité de l’amour. Philosophie et spiritualité juives.

Pourquoi j'ai écrit ce livre ?

Comment réfléchir à  l’amour dans la tradition juive alors que la critique chrétienne a voulu priver cette tradition d’une réelle pensée de l’amour sous prétexte de la centralité de sa Loi ? Ce livre s’efforce de montrer comment les philosophes et les spirituels juifs – attentifs aux textes de la Torah – ont pourtant déployé une pensée de l’amour de grande importance.  Ils ont  eu ainsi  une  haute  conscience de  l’amour  de  Dieu  -  à  entendre,  comme  l’amour  qu’on  lui  porte et  comme  celui qu’Il  porte  à Ses  créatures -    et  de  l’amour  du  prochain,  ainsi  que  du  lien  entre  ces  différentes  expressions  de l’amour. Ils  en  ont  profondément  médité   la  complexité  théologique,  spirituelle,  émotionnelle  et  morale,  et  montré  ce  qu’elles  mettaient  en  jeu,  concrètement,  sensiblement,  dans  la  vie  humaine, sans sous-estimer les immenses difficultés théoriques et existentielles  qu’elles engagent. Ce livre analyse ces pensées en  gardant  à  l’esprit  que  le  verbe  « aimer »  et  le  mot  « amour »  si  souvent   galvaudés  et  maltraités exigent  beaucoup  de  pudeur   et de  gravité dans leur  emploi  sous  peine  de  les  confondre  avec  de  fades  ou  brutales  contrefaçons.
Le  choix  des  questions  examinées dépend  du  sentiment  de  leur caractère  impérieux  face  aux  simplifications  outrancières  qui  s’imposent  si souvent  en matière de  religion  dans  les  sociétés  modernes.  Ainsi,  pour  ne  prendre  qu’un  exemple,  central  dans  le  judaïsme  pour  le présent  propos :  sauf  à  devenir  un  leitmotiv  sans  engagement  intellectuel,  spirituel,  moral  et  émotionnel,  les  mots  répétés,  matin  et soir : « et  tu  aimeras  l’Eternel  ton  Dieu,  de  tout ton cœur,  de  toute  ton  âme  et  de  toutes  tes  forces »  (Dt 6, 5),  ne  cessent  d’exiger  de celui/celle  qui  les  dit  qu’il/elle  s’efforce  d’en  découvrir  la  vérité.  Non  pas  une  vérité  objective  et  définitive,  mais  une  vérité  existentielle  appelée  à  orienter  la  vie  de celui/celle  qui  les  prononce,  dans  le  clair-obscur  de ses  jours.  La question se pose aussi toutefois de savoir ce que peut faire un philosophe avec une telle vérité qui semble peu compatible avec un contenu rationnel.
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Extrait :

« Quand le mot « amour »  vient à l’esprit à propos de Dieu, il  s’agit d’une expérience, d’un témoignage ou d’une transmission de la mémoire de celui-ci, plutôt que d’une élaboration théologique abstraite censée décrire l’essence de Dieu, n’est-il pas préférable d’employer un verbe qui évoque la dynamique d’un événement plutôt qu’un attribut qui analyse l’essence suprême  - ce qu’une certaine théologie appelle telle -  de façon intemporelle ? Dire « Dieu aime »,  plutôt que Dieu est amour, ne revient pas à substituer une facilité de langage à une difficulté théorique, mais à éviter d’enfermer le mot Dieu dans une définition.  Cela convie   en outre à  souligner que l’expérience qu’en font les êtres humains, au cœur de leurs vies éphémères et si souvent éprouvées, doit  être interrogée constamment. Cette expérience,  à chaque instant fragile, voire prête à s’effacer pour céder la place à une nuit opaque, se partage évidemment de façon malaisée.  C’est pourquoi, sauf à en faire une incantation insignifiante, uniquement destinée à tarir les doutes avant qu’ils se lèvent, et cela souvent de façon autoritaire, la proposition « Dieu aime »  doit  se mesurer à une épreuve personnelle et collective »
Catherine Chalier est professeur émérite de philosophie. Elle a publié de nombreux ouvrages sur la source hébraïque de la pensée dont Lire la Torah (Seuil) et Aux sources du hassidisme, le Maggid de Mézéritch (Arfuyen).
Catherine Chalier.  La gravité de l’amour.  Philosophie et spiritualité juives. Paris, PUF, 2016.

 

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