A propos de la suppression de l'émission Spiritualités de Leili Anvar sur France Culture

19 juin 2017
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L'émission de Leili Anvar (les Racines du Ciel puis les Discussions du soir du Mercredi sur France-Culture sont des émissions qui sont très écoutées et plus  d'une fois, des lauréats ou des auteurs d’Écritures & Spiritualités ont été reçus dans ces belles émissions, plus que jamais aujourd'hui nécessaires.
Hélas, cette émission est en péril et risque d'être supprimée. Notre engagement pluriel et ouvert est ici directement interpellé, aussi je vous propose de lire ci-dessous ce très juste point de vue que Jean Lavoué, écrivain et éditeur d'une maison de poésie L'enfance dans les arbres (et familier d'Écritures & Spiritualités)  a adressé à Ouest-France en réaction à la décision de France-Culture.
Karima Berger, Présidente
"Pour une culture ouverte aux forces de l’esprit.
Plusieurs pétitions circulent sur les réseaux sociaux. Après huit ans d’émissions consacrées sur France-Culture au dialogue entre les spiritualités, d’abord avec Frédéric Lenoir pour « Les racines du ciel » puis seule, depuis deux ans, pour les Discussions du soir, Leili Anvar vient d’apprendre que son émission n’est pas reconduite dans la future grille des programmes de septembre. Motif : « la chaîne culturelle a d’autres préoccupations que la spiritualité ! » Nombreux sont les auditeurs qui s’émeuvent d’une telle décision. Qu’une chaîne publique consacre au dialogue entre les aspirations spirituelles de l’humanité une heure hebdomadaire constitue pour beaucoup un havre, une respiration, un signe d’espoir et d’ouverture en cette période de guerres de tranchées et de violences exercées au nom de la religion.
Leili Anvar incarne elle-même ce pluralisme tant par son origine iranienne et sa spécialisation dans la mystique et la poésie soufies - ses œuvres de traductrice du grand poète persan Attâr en témoignent -  que par son ouverture et son intérêt pour toutes les manifestations de l’esprit. Sa porte n’était fermée à aucune expression, pourvu qu’elle ne soit pas revendicatrice d’une vérité exclusive mais qu’elle vise, au contraire, la fine pointe où toutes les expériences spirituelles authentiques finissent par converger.
On imagine aisément ce que des personnes, y compris dans ce monde de la culture, fermées à toute expérience de cette dimension d’intériorité, puissent trouver à redire en voyant défiler dans le studio de Leili Anvar des religieux ou des laïcs au sujet desquels il peut être tellement tentant de n’en rester qu’à l’apparence : aux signes religieux extérieurs ! Sans jamais chercher à percer, et d’ailleurs le plus souvent sans le pouvoir, le secret de ces vies habitées par le mystère d’une présence qui ne se réduit ni à l’intelligence, ni à la psyché ou au corps, ni au matérialisme utilitaire.
En ces temps où, plus que jamais, le dépassement des formes stériles de laïcisme pour s’ouvrir à une laïcité d’intercompréhension et de dialogue s’avère d’une urgente nécessité, la fermeture de cette fenêtre de réceptivité et d’intelligence à l’égard de l’étincelle de l’âme humaine paraît incompréhensible. Pire c’est une erreur, une faute majeure ! Là où devrait être encouragé tout espace de rencontre avec l’autre dans sa différence, sa beauté intérieure et sa sensibilité aux choses de l’esprit, comment comprendre cet asséchement délibéré de la culture ? Car celle-ci ne saurait se résumer à la gestion de la psyché ou de l’intellect. Elle se doit de prendre aussi en compte ce qui en l’homme se révèle plus grand que lui mais ne pourrait pas être sans lui : ce que des athées, des  agnostiques comme des croyants peuvent d’ailleurs éprouver ! Or c’est bien à cela que s’attache précisément la voix de Leili Anvar comme celle de tous ces auteurs reçus au fil des années.
Si par souci d’une laïcité mal comprise on boucle de tels espaces publics, si par utilité marchande les chaînes publiques n’ont pour seule boussole que l’audimat, quitte à mépriser toute une partie de leurs auditeurs pour lesquels l’intériorité compte davantage que le divertissement, si l’impérialisme de la technique et des sciences doit réduire à néant toute velléité de penser l’homme dans sa dimension également spirituelle, alors on peut être sûr que des religions mal comprises et violentes continueront à dévaster les fragiles territoires de notre humanité."
Jean Lavoué, auteur et éditeur

 

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